L'angoisse de l'orphelin...
Posté: 22 Sep 2019, 20:21
RECHERCHE
13 mars 2013
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L'angoisse de l'orphelin
L'absence de parents modifie de façon durable la réponse au stress chez les rejetons de la princesse du Burundi
Par : Jean Hamann
On savait que les mammifères supérieurs, les souris, les rats et même certains oiseaux pouvaient garder des séquelles d'une séparation en bas âge de leurs parents. Voilà que des chercheuses annoncent, dans la revue Proceedings of the Royal Society B, que la chose est vraie même chez des poissons. C'est du moins le cas de la princesse du Burundi, Neolamprologus pulcher, une espèce africaine qui répond différemment au stress si ses premières semaines de vie se sont déroulées en l’absence de parents.
Clémence Meunier et Nadia Aubin-Horth, du Département de biologie, et Barbara Taborsky et Linda Tschirren, de l'Université de Berne, arrivent à cette conclusion après avoir étudié la réponse au stress chez cette espèce sociale. La princesse du Burundi est une espèce endémique du lac Tanganyika, en Afrique de l'Est. Elle vit normalement en groupes familiaux pouvant atteindre jusqu'à 40 individus. On y trouve le couple reproducteur, leurs rejetons et quelques aides familiales qui veillent sur la marmaille. Les jeunes atteignent la maturité sexuelle à l'âge d'un an.
Les chercheuses ont utilisé 240 alevins pour évaluer, en laboratoire, l'incidence de la présence de parents sur le développement comportemental des petits. À partir de leur dixième jour de vie, la moitié de ces alevins a été élevée dans des groupes familiaux normaux alors que les autres ont été placés avec leurs frères et sœurs seulement. À partir de l'âge de deux mois, les parents et les aides familiales ont été retirés du premier groupe. Par la suite, les alevins ont grandi avec leur fratrie uniquement jusqu'à l'âge de 18 mois.
Les tests effectués sur le cerveau de 36 de ces poissons ont révélé des différences entre les deux groupes dans le degré d'expression de deux gènes liés à la réponse au stress. Ces gènes gouvernent la synthèse de la corticotropine et des récepteurs de glucocorticoïdes. «L'environnement social dans lequel évoluent les petits pendant les premières semaines de vie a une influence sur l'expression de ces gènes jusqu'à l'âge adulte», constate Nadia Aubin-Horth.
Chez les mammifères, les parents et les petits ont des contacts physiques étroits au moment de l'alimentation ou du toilettage. Chez la princesse du Burundi, ces rapprochements n'existent pas. «L'influence de la présence des parents doit se manifester autrement, en déduit la chercheuse. Nous avons observé qu'il y avait plus d'interactions sociales entre les petits en présence des parents. Ces interactions sont peut-être nécessaires à l'apprentissage de comportements de soumission essentiels pour cette espèce sociale.»
13 mars 2013
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L'angoisse de l'orphelin
L'absence de parents modifie de façon durable la réponse au stress chez les rejetons de la princesse du Burundi
Par : Jean Hamann
On savait que les mammifères supérieurs, les souris, les rats et même certains oiseaux pouvaient garder des séquelles d'une séparation en bas âge de leurs parents. Voilà que des chercheuses annoncent, dans la revue Proceedings of the Royal Society B, que la chose est vraie même chez des poissons. C'est du moins le cas de la princesse du Burundi, Neolamprologus pulcher, une espèce africaine qui répond différemment au stress si ses premières semaines de vie se sont déroulées en l’absence de parents.
Clémence Meunier et Nadia Aubin-Horth, du Département de biologie, et Barbara Taborsky et Linda Tschirren, de l'Université de Berne, arrivent à cette conclusion après avoir étudié la réponse au stress chez cette espèce sociale. La princesse du Burundi est une espèce endémique du lac Tanganyika, en Afrique de l'Est. Elle vit normalement en groupes familiaux pouvant atteindre jusqu'à 40 individus. On y trouve le couple reproducteur, leurs rejetons et quelques aides familiales qui veillent sur la marmaille. Les jeunes atteignent la maturité sexuelle à l'âge d'un an.
Les chercheuses ont utilisé 240 alevins pour évaluer, en laboratoire, l'incidence de la présence de parents sur le développement comportemental des petits. À partir de leur dixième jour de vie, la moitié de ces alevins a été élevée dans des groupes familiaux normaux alors que les autres ont été placés avec leurs frères et sœurs seulement. À partir de l'âge de deux mois, les parents et les aides familiales ont été retirés du premier groupe. Par la suite, les alevins ont grandi avec leur fratrie uniquement jusqu'à l'âge de 18 mois.
Les tests effectués sur le cerveau de 36 de ces poissons ont révélé des différences entre les deux groupes dans le degré d'expression de deux gènes liés à la réponse au stress. Ces gènes gouvernent la synthèse de la corticotropine et des récepteurs de glucocorticoïdes. «L'environnement social dans lequel évoluent les petits pendant les premières semaines de vie a une influence sur l'expression de ces gènes jusqu'à l'âge adulte», constate Nadia Aubin-Horth.
Chez les mammifères, les parents et les petits ont des contacts physiques étroits au moment de l'alimentation ou du toilettage. Chez la princesse du Burundi, ces rapprochements n'existent pas. «L'influence de la présence des parents doit se manifester autrement, en déduit la chercheuse. Nous avons observé qu'il y avait plus d'interactions sociales entre les petits en présence des parents. Ces interactions sont peut-être nécessaires à l'apprentissage de comportements de soumission essentiels pour cette espèce sociale.»